Un site sensible en mutation depuis près d'un siècle...

 

Lorsque le visiteur parcourt aujourd’hui le site, il lui est difficile de retrouver dans le paysage actuel ce qui caractérisait jadis le site.

 

Le retrait progressif des activités maraîchères, d’une part,  la qualité de l’environnement et la proximité de la ville d’autre part ont exercé  un attrait indiscutable des citadins. Cette situation a entraîné de profondes modifications du paysage fréquenté jadis par les hortillons. A côté des espaces dédiés au jardinage « amateur », les terrains dits de loisirs se sont développés avec la création d’espaces engazonnés, arborés et fleuris modifiant l’écosystème.

Les taillis et les arbres de haute tige ont colonisé les parcelles abandonnées, des rieux se sont comblés…

 

 


Evolution du site

 

L’évolution du site des hortillonnages, avec la réduction de l’activité maraîchère à quelques irréductibles petits exploitants, a conduit si l’on intègre le jardinage parmi les activités de loisirs à la transformation progressive d’un « espace de travail » en un « espace ludique ».

 

Les difficultés du métier de maraîcher, l’âge des exploitants (50% des maraîchers étaient en 1980 âgés de plus de 50 ans, voire plus), les problèmes liés à la commercialisation des productions, l’absence d’une véritable organisation pour la distribution des produits, la concurrence avec les cultures de plein champ, les contraintes de l’environnement (parcellaire morcelé et dispersé, difficultés d’accès et de transport)… sont autant de raisons qui ont amené à cette situation.

 

Cette situation a été fort bien analysée par Cécile Clauzel en 2008 (1)

 

Le maraîchage, vocation originelle du site, a été le mode d’occupation de l’espace jusqu’en 1960, avant qu’une affectation aux loisirs, amorcée au début du XXème siècle, ne devienne à son tour dominante. Nous sommes donc passés d’un système essentiellement productif à un système récréatif;  dans un premier temps (1900–1960) majoritairement collectif (équipements de loisirs), puis individuel (potagers dominant, jardins d’agrément). La tendance s’inversant à partir de 1960 avec le développement des jardins d’agrément (source : DIREN).

 

Cette situation n’a pas été sans incidence sur la gestion du site (problèmes liés à l’entretien, modification du paysage et du bâti… ), sur le statut social des occupants, entraînant entre autre, de fait, une sérieuse augmentation du coût des terres. Une situation qu’il faudra nécessairement analyser et corriger si nous voulons éviter une croissance des friches suite à l’abandon des terrains par des propriétaires ne pouvant plus assurer un minimum d’entretien du site.

 

(1) CLAUZEL Céline. Mutations des hortillonnages d’Amiens vers une agriculture multifonctionnelle et urbaine, Economies et Sociétés; Série Systèmes agroalimentaires XLII, 11-12 (2008) 2297-2307

 

 

Source : Extrait du rapport du S.I.A.S.H. de juin 1981
Source : Extrait du rapport du S.I.A.S.H. de juin 1981

L'occupation des sols. Situation à la fin du XXème siècle

 

Grâce aux études engagées par les administrations régionales (D.D.E., DIREN…), préalablement à l’élaboration d’un Plan d’Occupation des Sols, essentiellement consacré aux hortillonnages, nous disposons de documents précis comme la situation de l’occupation des sols en 1981. L’organisation générale du parcellaire, la configuration et l’utilisation des terrains, la nature des occupants,  ont  ainsi été  finement analysés.

 

A la fin du XXème siècle, les différents types d’occupation du site se répartissaient approximativement ainsi :

-          110 ha de surface en eau (correspondant aux étangs, aux voies navigables et aux rieux)

-          56 ha de bâti

-          130 ha de terres dont 20 ha en cultures maraîchères, 10 ha en pépinières, 20 ha en jardins potagers, 45 ha à         affectation dominante en jardin d’agrément, 35 ha en bois et friches.

Il apparaissait donc que, sur 130 ha de terres, 15% de celles-ci étaient encore investies par le mode traditionnel d’occupation des hortillonnages, c’est-à-dire le maraîchage professionnel. (En effet, si 40 % des terres étaient affectés à des pratiques culturales, il existe une différence importante dans la nature de ces pratiques entre le maraîcher professionnel, les jardiniers amateurs et les pépiniéristes » (Source : S.I.A.S des hortillonnages, Groupe d’études, juin 1981).

 

 

Les effets de la mutation sont lisibles dans le paysage contemporain.

 

En 2013, une nouvelle étude intéressante (1) a été engagée sur le mode d'occupation des sols dans les hortillonnages dans le cadre d'une mission sollicitée par Amiens-Métropole. L'auteur, Romain Leconte nous fournit notamment une série de cartographies très explicites dont l'une porte sur l'occupation des sols. Nous pouvons ainsi observer que le maraîchage concerne de grandes parcelles aujourd'hui limitées aux franges du site, là où les terres sont plus accessibles avec les équipements mécanisés.

Notons que le coeur du site, où le parcellaire ancien a été heureusement conservé, a été investi par une multitude de propriétaires (ou locataires) qui y ont développé jardins, potagers, terrains d'agrément et de loisirs...

 

(1) LECONTE Romain. Les hortillonnages: étude de l'environnement et des activités humaines en 2013..., mémoire de stage, U.P.J.V., 2013.


La disparition des berges dites "naturelles"

Aires cultivées dans les années 1970 (Photo B. Bréart)
Aires cultivées dans les années 1970 (Photo B. Bréart)
Photo B. Bréart
Photo B. Bréart

 

L'absence d'entretien des rives a pour principales conséquences la déstabilisation des berges, la réduction des parcelles et le comblement des rieux.


Le comblement des rieux

Rieu en cours de comblement (Photo B.Bréart)
Rieu en cours de comblement (Photo B.Bréart)

L'écoulement des eaux à l'intérieur des Hortillonnages a été de tout temps une préoccupation majeure des hortillons. Il conditionne la sauvegarde du site.